Suite de notre immersion dans les montagnes

Jour 3 – 30/01

Nous passons une seconde mauvaise nuit.

On se réveille dans un autre univers : on a atterrit sur la lune... et oui, avec un peu de recul (et beaucoup d'imagination), notre bivouac, recouvert de sa couverture dorée, niché au creux de collines de pierres blanchies par le gel, et planté sur ce sol de poussière s'apparente fortement à une base lunaire !

Le jour se lève peu à peu. Doucement, les rayons du soleil glissent comme une voile le long de la montagne qui se dresse face à nous. Ils atteignent maintenant la surface des flots qui alors scintillent puis s'illuminent. Cette douce lumière du matin s'intensifie jusqu'à nous éblouir. Soudain une vision fabuleuse s'offre à nos mirettes : dans un reflet parfait, l'immense falaise recouverte de neige se dédouble sur les eaux lisses de la lagune

On reprend notre route en direction du 3eme et du 4eme col. Ils s'élèvent l'un et l'autre à 4650 et 4550m. Pour les atteindre, il nous faut d'abord suivre la rivière pendant près de 2h, avec en ligne de mire le premier mur de pierre. Une fois de plus, les cairns guident notre ascension. Bientôt, le sentier disparaît. Il nous faut alors progresser sur d'immenses cailloux, scellés les uns aux autres par le temps. Attention : ils sont parfois branlants ! Nous grimpons donc avec précaution. Une fois les blocs de pierres dépassés, il nous faut progresser jusqu'à atteindre des plaques de roches lisses inclinées à 45° ! Nous atteignons le sommet totalement essoufflé, mais dans la joie. Cependant, il ne faut pas trainer puisque nous attend l'ascension d'une seconde paroi.

Une descende bien raide nous mène à une laguna en contrebas. Le ciel se charge de plus en plus de nuages. Nous accélérons donc le pas. Lorsque nous entamons notre deuxième passe de la journée, la neige commence à tomber. Nous redoublons d'effort pour grimper. C'est là qu'on se rend compte que le mauvais temps complique vraiment une ascension. Heureusement que notre volonté d'avancer est plus forte que le manque de souffle et la douleur. Nous ne nous attardons pas en haut de la passe car la météo se détériore encore. On entame une descente assez violente. La neige complique notre affaire puisqu'elle rend la roche glissante. On essaie de se dépêcher malgré tout. La route jusqu'au campement n'en finit plus. La force commence à manquer. La neige n'arrête pas de tomber.

Enfin, nous montons nos tentes, et avec empressement : en 5 minutes nous les installons, pour éviter de les tremper ! Nos mains sont gelées et nos visages glacées. Une fois le bivouac dressé, nous nous précipitons à l'intérieur, et attendons le temps de se réchauffer. Il est près de 18h. La nuit ne tarde pas à tomber, tout comme la fatigue qui, dans nos duvets, nous guide.

Jour 4 - 31/01

Ce matin, on se réveille avec l'appréhension du mauvais temps et du passage des marécages. Les fameux marécages... Ce sont 3km – sur 1km de large – de flaques et de boue à traverser au fond de la vallée. Heureusement des petits amas de plantes tout vert nous permettent d'éviter de nous tremper : on enfile notre costume de Mario et on saute d'îlots en îlots. C'est parti ! Mais vite, je perds ma première vie : une petite glissade me mène dans la mélasse... Bastien me rattrape rapidement, puis pour lui, c'est « Game Over ». Bon, la première 1/2h, c'est une bonne partie de rigolade, mais ensuite on s'épuise et on se lasse (N'oublions pas que nous sautillons pendant plus d'1h à 4000!).

Allez maintenant on s'engage sur la passe... Celle ci on la redoute car c'est la plus haute. En plus, nous avons puisé dans nos ressources et les nuages sont à nos trousses. On se pose même la questions de savoir si on est bien en forme pour se la tenter. Mais on a la niaque alors on s'y attaque !

A y est nous voilà à 4650m, et ici c'est l'extase... Les monts se mêlent et s'entremêlent devant nos yeux, et deux lacs reflètent le ciel de son beau bleu.

La descente jusqu'au campement est éprouvante : on s'écarte involontairement du sentier principal alors on s'improvise un chemin sur des blocs de roche, toujours plus en aval. Le soir arrive doucement et on ne trouve toujours pas de campement. Le jour s'affaiblit grandement. On s'improvise donc un bivouac sur un terrain plat : on débroussaille pour ne pas que, pendant la nuit, les plantes et les pierres nous entaillent. Il est 18h quand enfin nous sommes « au chaud » sous nos tentes. Ce soir c'est noodle ! Hum, un régale !

Jour 5 - 01/02

On ne le sait pas encore, mais aujourd'hui c'est notre dernière journée de trek. Cette fois-ci sur le bon versant, le soleil atteint plus vite notre campement. On part donc plus tôt que les jours précédents : à 8h30. Aujourd'hui, deux cols nous attendent. Le premier, on penser le franchir facilement, mais la montagne ne se laisse pas grimper si docilement...

De l'autre côté, le lac Grande de los Verdes s'étend. On aperçoit au loin une cabane de berger et quelques moutons en train de gambader. On casse la croûte au bord du lac, puis on remet nos sacs et au dernier col on s'attaque. La carte nous indique de suivre la rivière... Le problème c'est qu'elle se disloque en de nombreux petits bras. Impossible donc de longer le sentier. Alors on trace le nôtre... mais on se vautre ! D'abord on s'épuise dans des marécages... Ensuite, notre énergie c'est sur des blocs de pierre qu'on la saccage... Mais au moins on prend de la hauteur, ce qui nous permet d'apercevoir le sentier, au loin sur le versant opposé... On reprend le file de la marche, on direction de l'ultime passe. Une fois en haut, le vent souffle et glace notre peau. On ne s'y attarde pas trop. Devant nous, les parages changent de couleurs puisque s'étirent de verts pâturages. Maintenant, nous suivons les innombrables chemins qui se faufilent jusqu'au rio qui creuse le fond de la vallée. Des troupeaux de boules de laine observent notre passage d'un air curieux, presque inquiet. Les plus froussards nous fuient en bondissant maladroitement.

On traverse le rio puis remontons jusqu'à la Parada Romero, où nous pensons passer notre dernière nuit. Mais finalement, aussi improbable que cela puisse paraître, une camionnette quitte les lieux en direction du village de Guican, que nous ne pensiions rallier que demain, à pied ! Nous embarquons à l'arrière, partageant l'espace avec nos bagpacks, quelques sacs de viande ainsi qu'une carcasse de mouton. Plusieurs arrêts rythment le trajet. A un moment, la carcasse descend, mais c'est une peau encore ensanglantée qui prend sa place à nos côtés. Après une bonne heure de trajet à l'arrière de la fourgonette, à respirer la poussière qui voltigent depuis le chemin de terre, nous atteignons Guican. Nous voilà de retour à la civilisation, à l'animation, à l'agitation.

Mais la journée ne s'arrête pas là : un bus part d'ici peu pour Cocuy, notre point d'arrivée, le village qu'il y a 5jours nous avons quitté.

A y est, nous y voilà. Nous déposons nos gros sacs, et allons rapidement trinquer à notre magnifique (magique?!) randonnée. S'en suit une excellente dégustation de frites, de poulet, de riz, autant de denrées qui nous ont manquées !

Si vous avez encore du temps, une petite vidéo vous attend!